Lecture à thème du mois de juillet : Eva Luna par Isabel Allende, la réunion de la frustration et du génie



              Je pense que l'adjectif qualifiant le mieux ma lecture d'Eva Luna est "déroutante". Au moment où j'écris ces lignes, je ne sais toujours pas si j'ai aimé ce roman ou non. Je dois admettre que je ne partais pas dans de bonnes dispositions car ma lecture précédente (Les Piliers de la Terre de Ken Follett dont je vous parlerai très prochainement) fut pour moi un véritable coup de foudre littéraire. J'étais en retard pour la lecture à thème du mois de juillet (littérature étrangère mais pas anglophone) et je n'ai pas eu le temps d'avoir une transition adéquate : les personnages de Ken Follett me manquaient horriblement, je n'étais pas encore prête à passer à autre chose, ... ; bref, je vivais un chagrin d'amour littéraire. Comme pour tout chagrin d'amour, la remise en route était compliquée, surtout si tôt, et j'ai eu du mal à rentrer dans le roman.

               Dans ce roman, Eva raconte sa propre histoire, depuis l'enfance de sa mère Consuelo jusqu'à son propre mariage en passant par sa conception. Il lui arrive de nombreuses aventures auprès de ses différents patrons et au gré de ses rencontres, notamment avec Huberto Naranjo, le gamin des rues qui deviendra leader de la guerilla, et Riad Halabi, dit "le Turc", qui lui sert à la fois de patron, de père de substitution, d'ami et plus encore.

               A travers Eva Luna, Isabel Allende aborde des thèmes qui lui sont chers et peuvent rappeler son célèbre roman La Maison aux esprits comme la vie quotidienne en Amérique Latine sous les dictatures et régimes autoritaires, la censure, la guerilla, etc. mais aussi ce qu'on pourrait nommer esprits/fantômes/créatures de l'au-delà qui sont typiques de l'écriture d'Allende. L'auteure nous présente des personnages hauts en couleur dont on ne se lasse pas. J'ai particulièrement apprécié le personnage de Melecio/Mimi que j'ai trouvé(e) très attachant(e), et surtout, c'est la première fois que je vois un personnage transsexuel dans un livre, qui plus est parmi les personnages principaux. Le sujet de la transsexualité reste encore aujourd'hui malheureusement tabou (bien que ce soit de moins en moins le cas), et il faut songer que ce roman fut publié il y a plus de trente ans, au Chili, à une époque où quasiment toute l'Amérique Latine souffrait de l'oppression sociale !

               Malgré toutes les qualités que l'ont peut trouver à ce roman, je tiens tout de même à émettre un bémol. En premier lieu un petit problème que l'on ne peut pas imputer à cette pauvre Isabel : la traduction. Les phrases sont longues et les tournures assez lourdes alors que je trouve l'écriture d'Allende en général un peu plus fluide en espagnol (d'où l'intérêt de lire en V.O. dans la mesure du possible). On sent que ce n'est pas une traduction très moderne, mais peut-être qu'il existe d'autres versions que celle que j'ai lue dans lesquelles vous pourriez découvrir Eva Luna avec une meilleure approche que moi (je possède la traduction de 1988 par Claude et Carmen Durand). Hormis ce "problème de traduction", il y a un autre détail qui m'a un peu irritée : Isabel Alllende spoil elle-même son roman ! Je m'explique : à plusieurs reprises l'auteure annonce ce qui se passera plusieurs chapitres plus tard, ce qui m'agace prodigieusement en lecture. Si quelque chose doit se passer plus tard, eh bien je le lirai bien plus tard ! pourquoi l'annoncer dès le début ? J'avoue ne pas avoir compris l'intérêt, peut-être n'y en a-t-il pas et il s'agit simplement d'un procédé narratif qui ne me correspond pas en tant que lectrice...

               En conclusion, une lecture assez mitigée qui, je pense, ne peut pas plaire à tout le monde mais qui, si on s'y intéresse, mérite qu'on s'y accroche ne serait-ce que pour l'ultime paragraphe que je considère comme un pur concentré de génie !


A bientôt,
Roxane.

Commentaires

Articles les plus consultés